Cet article a été initialement publié dans Les Echos, le 10 avril 2019. Cliquez ici pour lire l'article original.
Nous avons tous eu ce sentiment que la politique, surtout en Europe, se jouait sans nous. Nous avons tous eu cette impression que nous n’étions pas entendus. Nous avons tous déploré notre incapacité́ à participer aux choix de nos gouvernements.
Le 23 juin 2016, les Britanniques décidaient de quitter l’Union européenne dans le cadre d’un referendum : « Choix du peuple », « véritable démocratie », « légitimité suprême du souverain dans ses décisions » … Trois ans plus tard, force est de constater que les responsables politiques du Royaume-Uni peinent à réaliser un désir politique clairement exprimé mais fondé sur des informations partielles, voire partisanes. Face aux échecs des referendum, bien souvent réducteurs, il est temps de repenser la place du citoyen dans les institutions politiques. Plus que jamais, nous devons dépasser la simple consultation pour embrasser toutes les formes de démocratie participative.
Le mouvement des gilets jaunes, les marches pour le climat ou encore la multiplication des pétitions demandent de donner un rôle nouveau aux citoyens dans l’Union européenne. Ce défi de l’inclusion ne saurait être réduit à la multiplication des processus référendaires. En effet, la participation des citoyens est multiforme, tant dans la conception que dans l’évaluation des politiques publiques.
Dans ce contexte, il est plus que jamais temps de transformer nos institutions pour permettre à l’Union européenne et à ses États membres de gagner leur confiance. Il nous faut abolir les barrières empêchant la participation de tous et offrir de nouvelles possibilités de contribution à la décision publique.
Un budget européen participatif
Pour renouveler le contrat social sur lequel repose nos institutions politiques, l’Union européenne doit s’inspirer des meilleures pratiques de démocratie locale. La Commission européenne pourrait notamment donner aux citoyens la possibilité de choisir la manière dont est utilisée une partie du budget européen. Demain, l’Union européenne ferait comme Grenoble, Paris ou Madrid et confierait à chaque contribuable la responsabilité de choisir la meilleure manière de dépenser une partie des impôts qui leur sont prélevés.
Concrètement, chaque citoyen pourrait voter pour plus de solidarité, des actions environnementales plus fortes ou pour des infrastructures structurantes.
Plateformes de délibération
L’Union européenne doit aussi se saisir des opportunités nouvelles permises par le numérique en recourant de manière plus systématique aux plateformes. Il ne s’agit pas pour le citoyen d’être mis face à des choix binaires ou de voter en lieu et place du législateur mais bien de façonner les politiques grâce à son expertise quotidienne. Cela donnera au citoyen la possibilité de faire des retours sur les propositions législatives, de prendre part aux décisions politiques et de façonner sa société.
Les start-ups montrent tous les jours que l’innovation émerge plus facilement dans un écosystème de collaboration ouvert. Il est temps que les institutions s’ouvrent et apprennent à profiter des talents de tous.
Rappelons-nous que le Parlement européen est aussi un organe de contrôle de l’action de l’Union européenne. Dans ce domaine, ne serait-il pas utile de demander de manière régulière aux citoyens leur niveau de satisfaction sur des décisions prises ? En donnant la possibilité à tous d’évaluer les politiques, leur acceptation n’en serait que renforcée.
Une union de citoyens
Il ne s’agit pas de rendre la participation et le contrôle des citoyens contraignants dans chaque situation, ni de remettre en cause la démocratie représentative avant tout fondée sur la délégation de son pouvoir et non sur son exercice par le peuple souverain.
Toutefois, face à la crise de confiance, le modèle démocratique de l’Union européenne doit se réinventer en laissant toute sa place aux citoyens. Condition de sa légitimité et de ses succès futurs, une plus grande inclusion des citoyens dans les institutions est l’unique moyen de transformer l’Union européenne en une véritable union de citoyens.